Chapitre 2 ; Les courants psychothérapeutique et psychiatrique de la psychopathologie La psychopathologie cognitiviste Depuis 1960, le concept de cognition s’élargit à « l’ensemble des processus par lesquels une personne acquiert des informations sur elle-même et son environnement, et les assimile pour régler son comportement » (Ionescu p. 53). Une première étape du cognitivisme a mis l’accent « sur les troubles ou distorsions de la structure cognitive et s’intéressent surtout à « l’entrée » informationnelle (l’input). C’est le cas de ce qu’on appelle les deux précurseurs des théories cognitives actuelles : la théorie des « construits personnels » de Kelly (1955) et le cadre théorique sous-jacent à la thérapie relationnelle émotive de Ellis (1962). Dans ce même groupe figure la théorie cognitive de la dépression de Aaron Beck (1967, 1976) » (o.c. p. 53) « Un deuxième regroupement réunit les théories qui s’intéressent surtout aux stratégies comportementales inefficaces et, par conséquent, à « la sortie » comportementale (l’output). Parmi celles-ci, la plus connue est la théorie de la dépression en tant qu’impuissance acquise, élaborée par Martin Seligman (1974, 1975) et, à présent, dénommée la théorie du désespoir d’Abramson, Seligman et Teasdale (1978) ». (…) « La démarche conceptuelle dominante en psychologie et psychopathologie cognitiviste est, actuellement, le paradigme du traitement de l’information. Conformément à ce paradigme, le fonctionnement humain peut être conceptualisé et compris en termes de : « comment l’information provenant de l’environnement et l’information interne sont traitées et utilisées » (Ingram&Kendall, 1986). Le sujet est ainsi conçu comme un système de traitement de l’information » (p. 54).
Aaron Beck a proposé la première théorie de la dépression qui jette les bases cognitivistes et fait toujours recette même si des chercheurs pensent « qu’il n’est pas possible d’évaluer la validité des théories cognitivistes de la dépression sur la base des études réalisées jusqu’à présent. Selon ces auteurs, les stratégies de recherche utilisées ne permettent pas de tester de manière adéquate les postulats de base des deux théories mentionnées, n’évaluent pas tous les types de relations causales que ces théories impliquent et, enfin, ne tiennent pas compte de l’hétérogénéité des troubles dépressifs (il n’y a pas une dépression, mais des dépressions) » (p. 54-55). Pour les cognitivo-comportementalistes, la validation des théories et l’excellence de la pratique testée par des statistiques sont primordiales. Si ce n’est pas le cas, ils le disent et essayent de corriger ou d’améliorer. C’est ainsi que le recours à la méditation est venu pallier aux rechutes dépressives, point encore faible du système. La dépression, névrotique surtout, est une réaction à des causes ; il y a une étiologie. Voici d’abord la systématisation de ces causes. La cause nécessaire ne provoque pas nécessairement les symptômes ; sans symptôme, il n’y a pas de cause suffisante ; la cause contributive n’est ni nécessaire ni suffisante. Certaines causes peuvent agir (…) près du moment d’apparition des symptômes (causes proximales) tandis que d’autres peuvent agir à l’autre bout de la chaîne, à distance du point d’apparition des symptômes (causes distales) » (p. 55).
« Cette théorie peut être schématisée sous la forme d’une chaîne causale séquentielle qui va des causes contributives distales, aux causes contributives proximales et conduit à la cause suffisante proximale de la dépression. Dans la théorie de Beck, les causes contributives distales sont la diathèse cognitive et le stress produit par les événements de vie négatifs. Selon Beck (1967), il y a une diathèse (une disposition) qui fait que certaines personnes ont tendance plus que d’autres à des distorsions cognitives négatives sur soi, sur le monde et l’avenir. Dans la théorie de Beck, la diathèse cognitive est constituée de ce qu’il appelle un schéma, (…) une représentation organisée des connaissances antérieures qui oriente le traitement de l’information actuelle. Le schéma est constitué à partir d’informations recueillies au cours d’expériences passées. Stocké dans la mémoire à long terme, le schéma fonctionne de manière automatique. Le schéma dépressogène a un contenu négatif qui fait référence à des notions comme la perte, l’échec, l’inadéquation, etc… Il sélectionne, filtre et interprète l’information, en donnant un sens dépressif aux événements que vit le sujet. Activé par le stress causé par les événements de vie négatifs, le schéma dépressogène conduit à des distorsions cognitives de l’information qui reçoit le sujet. Les distorsions cognitives (causes contributives proximales) sont considérées comme des produits relativement automatiques du traitement de l’information. Beck soutient que les personnes prédisposées à la dépression font des inférences irréalistes, extrêmes et illogiques quant à eux et à leurs environnements. Les distorsions cognitives comportent les types suivants d’erreurs logiques : La triade cognitive négative constituerait la cause suffisante proximale dans la théorie de Beck. Cette triade implique un point de vue négatif (ou une opinion négative) sur soi-même, des jugements pessimistes sur le monde extérieur et un point de vue négatif quant à l’avenir, notamment en s’attendant à ce que les difficultés présentes persistent. La présence de la triade cognitive négative s’accompagne de l’apparition des symptômes de la dépression qui sont : Nous devons à Ionescu ce résumé parfait de la théorie de Beck que Jean Cottraux a importée en France. Permettons-nous de transcrire en termes simples : Nous n’évoquons pas ici toutes les recherches faites par les cognitivistes por accréditer un inconscient… cognitif qui serait plutôt du côté du subconscient janétien et du préconscient freudien. Le rapprochement avec la démarche analytique ne s’arrête pas là puisque les causes « distales » d’ici ne sont que les événements de l’enfance de là-bas (psychanalytiques). Quant à des concepts aussi complexes que culpabilité, auto-reproche ou vision négative ils ne dépareilleraient pas sur un divan, ou sur le matelas somatanalytique. Courte d’un côté (6 mois) et longue de l’autre (6 ans), les durées de la cure se modifient pour se retrouver en séquence moyenne (1 à 2 ans) !
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